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Et si on régionalisait aussi la copropriété ?

luc
Pimonaute non modérable
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Re : Et si on régionalisait aussi la copropriété ?

PIM a écrit :

(...) «Attention, cependant, à ne pas faire de comparaison hâtive, met en garde Yves Van Ermen. La France doit faire face à des problèmes d'une toute autre échelle que ce que nous connaissons en Belgique.» De fait, outre-Quiévrain, un grand nombre de copropriétés ont été construites dans les années 1950 à 1980. Et parmi elles, on relève une frange importante d'immeubles étageant des centaines d'appartements. Soit un paysage de grands complexes vieillissants aux antipodes du nôtre, où «90% des copropriétés comptent moins de 10 appartements», précise-t-il. Et d'ajouter que «la situation y est autrement plus grave que chez nous. Les prémisses de cette crise française de la copropriété remontent d'ailleurs au tournant des années 1980-90.» (...)

Aujourd'hui de retour d'un séjour à Paris, je confirme l'opinion de l'ABSA.

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PIM
Pimonaute non modérable
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Et si on régionalisait aussi la copropriété ?

Un intéressant résumé de la situation actuelle

Un article de Frédérique Masquelier (magazine Le vif n°24 - du 15 au 31 juin 2012)


"Près de deux Belges sur cinq vivent en copropriété. D'où l'intérêt de se poser la question de l'adéquation de la loi qui la régit. Dans l'optique d'une régionalisation complète des compétences liées au Logement, celle-ci se devrait peut-être de quitter le giron fédéral.

La Belgique compte 1,2 millions de biens en copropriété. Des logements pour l'essentiel, qui abritent entre 3 et 4,5 millions de personnes. Soit près de deux Belges sur cinq. Tous répondent d'une même loi, fédérale, écrite en 1994, corrigée en 2010, que leur toit soit situé en Flandre, à Bruxelles ou en Wallonie.
Et si cette loi sur la copropriété était régionalisée ? La question n'est pas dénuée de sens. Depuis que le Logement a été confié aux Régions, en 1980, les autorités politiques n'ont eu de cesse d’accroître leur champ d'action en la matière. Ainsi, des compétences telles que l'urbanisme, la pollution du sol ou encore le code du logement font déjà partie des portefeuilles régionaux. Et il est actuellement question du transfert de la loi sur les baux d'habitation – au même titre que les baux commerciaux et à ferme. Autrement dit, de la possibilité pour les Régions de réguler non seulement la sphère des logements publics, mais aussi celle des logements privés, en agissant directement sur les contrats de location.

Dans de telles circonstances, on serait tenté de conclure que le Logement sera bientôt entièrement alloué aux Régions. «D'où l'intérêt de s'interroger sur l'avenir de la loi sur la copropriété», affirme Olivier Hamal, vice-président du Syndicat national des propriétaires et des copropriétaires (SNP). Laquelle fait figure de grande oubliée dans le chef des partis politiques. «Beaucoup la considèrent comme une question purement juridique, qui touche à la notion de propriété et fait l'objet de quelques dispositions dans le Code civil.» Et d'insister sur la dimension sociétale que revêt celle-ci : «Il ne faut pas passer outre le volet «logement» de la loi sur la copropriété. À travers elle, on s'adresse à des personnes, on touche à leur lieu de vie, leur patrimoine, leur pouvoir d'achat.»
Par ailleurs, au plus les Régions gagnent du terrain sur le logement, au plus l'écart entre les propriétaires et les copropriétaires se creuse. Ceux-ci n'étant pas régis par les mêmes lois et les mêmes niveaux de pouvoir, le risque d'aboutir à une forme de discrimination n'est pas à écarter. À l'avenir, il se pourrait que propriétaires et copropriétaires ne soient pas égaux face aux orientations et aux priorités que chaque gouvernement régional voudra donner à sa propre politique du logement. De même que les éventuelles aides et autres primes.

La revendication du SNP semble d'autant plus pertinente si l'on considère que la copropriété est destinée à gagner du terrain dans les décennies à venir. «À l'horizon 2050, la moitié de la population belge vivra en copropriété, pointe Olivier Hamal. Dans les grandes villes, où l'on retrouve la plupart des grands immeubles et où de plus en plus d'unifamiliales sont divisées en appartements.» «Mais aussi partout ailleurs en Belgique, intervient Yves Van Ermen, président de la commission des syndics de l'IPI, l'Institut professionnel des agents immobiliers. On constate que les copropriétés s'implantent en grand nombre dans beaucoup de villes provinciales, à coups de résidences de 30 à 50 unités, là où très peu d'entre elles existaient auparavant.»

Pour ou contre la régionalisation ?

L'idée de la régionalisation de la loi sur la copropriété se résume aujourd'hui à une piste de réflexion lancée par Olivier Hamal, tel un pavé dans la mare. Elle n'a encore jamais été mise sur la table. Ni même fait l'objet d'un quelconque débat public. Si les uns et les autres se positionnent pour ou contre sa réalisation, tous lui reconnaissent une certaine «logique». Ainsi, le député bruxellois Olivier de Clippele, qui a récemment interpellé le secrétaire d’État au Logement de la Région Bruxelloise à propos des copropriétés en difficultés au sein de la capitale, perçoit cette éventualité comme «un corollaire logique de la régionalisation de la loi sur les baux». Et ce, même s'il affirme haut et fort être opposé à la régionalisation massive des compétences fédérales. Dans la même veine, ajoute-t-il, la législation sur les ascenseurs, fédérale elle aussi, pose également question, sachant que «Bruxelles compte un nombre relatif d'appartements nettement plus important que la Flandre et la Wallonie.»

De son côté, Yves Van Ermen reconnaît que les propositions d'Olivier Hamal ne sont pas dénuées d'intérêt. «L'idée est bonne et nous souhaitons l'étudier au sein de l'IPI, avant de prendre position.» Toutefois, celui-ci ne peut s'empêcher de mettre en garde les partisans de la régionalisation contre la complexité administrative que cela va engendrer pour les syndics. «Si les règles en matière de copropriété changent d'une Région à l'autre, cela va rendre la tâche des syndics plus ardue qu'elle ne l'est déjà, explique-t-il. Surtout pour ceux qui travaillent à l'échelle du pays.» Sans compter qu'une telle régionalisation équivaudrait à opérer un «retour en arrière» par rapport aux acquis de la révision de la loi sur la copropriété, qui a eu lieu en 2010. «Or, on était justement parvenus à harmoniser tout le système au niveau national.» Et de craindre que la différenciation des réglementations en matière de copropriété ne porte atteinte à leurs bénéficiaires, à l'instar de l'interprétation – divergente – de la législation européenne sur les certificats de performance énergétique des bâtiments (PEB) par les trois Régions.

Un appartement n'est pas une 4 façades

Plus encore que la question de la régionalisation, il est en tous cas fondamental, du moins aux yeux de Olivier Hamal, de prendre conscience des dysfonctionnements des copropriétés en Belgique. Dont beaucoup sont liés à l'essence même de la copropriété.

«Lorsqu'on vit dans une copropriété, la plus grande difficulté à surmonter est avant tout intrinsèque, analyse-t-il. Les copropriétaires perdent de vue l'approche collective qu'ils sont censés adopter à partir du moment où ils décident d'acquérir un tel bien.» En d'autres termes, ils continuent à penser et agir de manière individuelle, en oubliant qu'ils ont signé pour un projet commun, au sein duquel la majorité a toujours la priorité. «La plupart des gens qui vivent dans un appartement réagissent comme s'ils habitaient dans une 4-façades, avertit le vice-président du SNP. Ils ne comprennent pas pourquoi ils doivent payer pour les parties communes et n'acceptent pas de se plier aux décisions prises par l'assemblée générale des copropriétaires.» Qu'il s'agisse de remplacer la chaudière, refaire la toiture ou les façades, voire réparer l'ascenseur, beaucoup de copropriétaires rechignent à mettre la main au porte-monnaie. «Parce qu'ils n'en voient pas l'utilité, parce qu'ils sont radins, n'en ont pas les moyens ou ne vivent pas dans le bâtiment, et, en tant que simples bailleurs, se sentent moins concernés», ajoute-t-il. Toutes les raisons sont bonnes pour refuser d'engager des frais dès que ceux-ci ne concernent pas les parties privatives.
Or, il faut le reconnaître, ces frais sont généralement élevés, même après la division des coûts entre les copropriétaires. Et ceux-ci n'en ont pas pris nécessairement la mesure, au moment de signer le compromis de vente. «Quand bien même ils reçoivent les procès-verbaux des assemblées générales et les décomptes des charges des années précédentes, ainsi que la liste des grands travaux à venir», assure Yves Van Ermen. Et la copropriété de se retrouver avec des impayés et des copropriétaires insolvables sur les bras. «Le syndic est chargé de récupérer les sommes dues auprès des mauvais payeurs, poursuit-il. Mais ce n'est pas chose facile, surtout que les copropriétaires ont le pouvoir d'éjecter tout syndic un peu trop dévoué à sa tache à chaque assemblée générale...»
Résultat ? Ce sont toujours les mêmes qui paient les pots cassés. «Quand un copropriétaire ne paye pas, ce sont les autres qui doivent payer pour lui, met en garde Olivier Hamal. Et, en cas de saisie, la copropriété passe bien après la banque et les créanciers.» Ce qui n'arriverait pas si la Belgique suivait l'exemple de la France et instaurait une forme de privilège pour les copropriétés.

Le cercle vicieux de la copropriété

Ces déboires financiers sont souvent concomitants à une évolution sociologique des copropriétés. «En étudiant l'historique des bâtiments, on s'aperçoit que dans beaucoup de cas, ceux-ci étaient initialement le fait d'une classe moyenne à supérieure, reprend Olivier Hamal.  Jusqu'à ce que, le bien prenant de l'âge et perdant en valeur, il se voit récupéré par une population aux revenus moindres.» Qui profite d'un prix d'acquisition plus faible, sans prendre en compte les travaux de rénovation qui l'attendent au tournant.

Et puis, il y a aussi les charges à payer. Lesquelles équivalent souvent, et pour les mêmes raisons de dégradation du bâti, à des montants colossaux. «Le chauffage, pour ne citer que lui, représente 30 à 50% des charges communes en Belgique», indique Yves Van Ermen. «Avec l'augmentation des coûts de l'énergie, certains en sont arrivés à devoir emprunter pour payer leurs charges courantes», surenchérit Olivier Hamal. D'où l'importance de la performance énergétique des bâtiments. Qui nécessite, elle aussi, des travaux de mise en conformité.

Une des solutions proposées pour enrayer ce cercle vicieux est la constitution d'un Fonds de réserve financé à concurrence d'un certain pourcentage des dépenses courantes. «Mais le fait que cette démarche ne soit pas obligatoire, comme c'est le cas au Québec et aux Pays-Bas, freine tout progrès en ce sens», déplore Olivier Hamal. Autre option, le prêt aux copropriétés. «Les banques commencent à peine à entrevoir l'ampleur du marché et à s'intéresser à la question», ajoute-t-il. Mais comment trouver un patrimoine à mettre en hypothèque quand on a une personnalité juridique équivalente à celle d'une ASBL ? Et il va sans dire qu'aucun copropriétaire ne veut se porter garant pour un prêt qui concerne les parties communes... «Elantis Selex, une des filiale de Belfius, a trouvé la parade et propose un prêt sans garantie hypothécaire, à la seule condition de contracter une assurance pour couvrir les éventuels impayés.»

La réforme (attendue) de l'IPI

Enfin, parmi les fléaux de la copropriété, il est celui des syndics indélicats ou peu scrupuleux. Les cas ne sont pas légion, loin de là, mais ils existent. Et vont du syndic qui fait appel à l'entreprise de construction de son gendre ou à la société de courtage en assurances de sa sœur, à celui qui considère les finances de la copropriété comme siennes. «Le SNP suit cinq dossiers en particulier, dans lesquels des syndics sont partis avec la caisse, fustige Olivier Hamal. On parle ici de plus de 500 copropriétaires floués, des dizaines d'immeubles et un préjudice total avoisinant les 1,5 millions d'euros.»

Afin de prévenir ces petits et grands délits, la loi qui réglemente la profession d'agent immobilier, regroupant les courtiers et les syndics, vient d'être considérablement durcie. Ce dont le SNP se félicite. À savoir, entre autres, une meilleure formation professionnelle, la mise en place d'une assurance responsabilité professionnelle, un suivi disciplinaire rapide et efficace, des sanctions adaptées (allant jusqu'à la radiation en cas de détournement), la soumission des professions libérales qui s'improvisent syndics aux règles de déontologie de l'IPI, l'obligation pour tout syndic de communiquer à l'IPI la liste des copropriétés à sa charge, etc.
 

La France, exemple ou contre-exemple ?

Les copropriétés belges soulèvent moins de problèmes et de drames que les copropriétés françaises, qui sont nombreuses à être dans le rouge. Sur 6,2 millions de résidences principales en copropriété, environ 15 % rencontrent de graves problèmes financiers et de dégradation du bâti. Les autorités politiques ont donc retroussé leurs manches et établi un plan d'action. Afin de leur venir en aide, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) a versé plus de 470 millions d'euros de subventions aux copropriétés entre 2006 et 2010, générant plus d'un milliard d'euros de travaux.

Un exemple qu'Olivier Hamal exhorte à suivre. «Si on ne fait rien, les ennuis que connaît la France seront nôtres dans 15 ou 20 ans. Or, on ne peut pas dire que l'Hexagone n'ait rien vu venir, puisque les Français ont voté une loi sur la copropriété dès 1938, modifiée en 1965 et en 2000.» La Belgique a, quant à elle, attendu 1994 pour légiférer. Un laps de temps qui ne lui aura pas été profitable, puisque la jeune loi s'est attiré nombre de critiques dès son entrée en vigueur. «Et il a fallu attendre 2010 pour que celle-ci soit revue, en tenant compte des lacunes de la précédente», condamne-t-il.
Qui plus est, la France a mis sur pied de nombreux outils pour recenser et analyser les copropriétés. Ce qui est loin d'être le cas de la Belgique. «Il n'existe même pas de cellule vers laquelle les copropriétaires peuvent se tourner en cas de problème ou de simple recherche d'information, regrette Olivier Hamal. Et ce, tant à l'échelle locale, que régionale ou même fédérale.»

«Attention, cependant, à ne pas faire de comparaison hâtive, met en garde Yves Van Ermen. La France doit faire face à des problèmes d'une toute autre échelle que ce que nous connaissons en Belgique.» De fait, outre-Quiévrain, un grand nombre de copropriétés ont été construites dans les années 1950 à 1980. Et parmi elles, on relève une frange importante d'immeubles étageant des centaines d'appartements. Soit un paysage de grands complexes vieillissants aux antipodes du nôtre, où «90% des copropriétés comptent moins de 10 appartements», précise-t-il. Et d'ajouter que «la situation y est autrement plus grave que chez nous. Les prémisses de cette crise française de la copropriété remontent d'ailleurs au tournant des années 1980-90.»

(fin de citation)

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