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Je viens tant vous raconter une histoire, que poser des questions pointues aux experts juridiques qui hantent ce forum.
Voici l'histoire que je vis actuellement.
Je suis l'heureux proprio d'un immeuble de rapport. Quand je l'ai acheté, un charmant monsieur, relativement bien de sa personne bien qu'un peu bizarre, occupait un des appartements. Ce monsieur, appelons le A., est sous administration de bien, donc reconnu incapable juridiquement.
Si j'ai bien compris, quelqu'un sous administration de bien, c'est comme un mineur, mais qui ne vit pas chez son tuteur. N'oublions pas que même les fous ont le droit à un toit...
Je passerai les éléments externes à l'affaire qui s'est déroulée ce jour. Ce serait amusant et instructif, mais hors de propos. Je vais donc tenter de me limiter aux faits...
Depuis quelques mois, A. disjoncte. Il a passé quelques mois l'été dernier en institution psychiatrique. Il en est sorti, avec un traitement à suivre, et n'a jamais suivi son traitement.
Il vit dans une crasse épouvantable. C'est pis que de l'insalubrité: il n'a plus remplis ses sacs poubelle depuis des mois. C'est pas qu'il ne les sort plus: il ne les remplis même plus!
Il perd ses clés, et donc dérange les voisins pour qu'on lui ouvre l'immeuble. Il a tellement l'habitude de sonner qu'il le fait même quand il a ses clés sur lui.
J'ai prévenu son admnistrateur, qui a décidé que ce ne serait pas déontologique de le faire réinterner contre son gré. Je suis passé par la police, par le procureur du roi, par les infirmières sociales, ... et je n'ai rien obtenu.
J'ai beau expliquer qu'il se laisse aller, qu'il a perdu 15kg en 6 mois, qu'il perd son pantalon, qu'i perd ses dents, qu'il ne se nourrit plus, et que personne ne semble rien vouloir faire avant qu'il ne soit mort.... rien n'y fait.
Je n'ai pas rompu le contact avec A. Je l'ai gardé. Il ne se rend plus compte des choses. Il pense qu'il va regagner son indépendance par rapport à son administrateur. Qu'il va aller vivre à l'étranger. Et surtout que tout va bien aujourd'hui! Bref, il ne comprend pas ce qui lui arrive.
Son pharmacien habituel m'a confirmé qu'il n'était plus client... l'air de dire sans le dire qu'il était persuadé que A. ne prenait pas son traitement. Il semble qu'en Belgique, on puisse être laché dans la nature sans aucune contrainte de prendre son traitement. On appelle cela la liberté. Moi, j'appelle cela de la non assistance à personne en danger!
Aujourd'hui, après être passé en conciliation il y a deux semaines, je suis passé devant le juge. J'ai été cherché A. pour être sûr qu'il serait bien présent.
J'ai demandé la résolution du bail pour occupation non conforme à la notion juridique du "bon père de famille". Le juge avait vu les photos à la séance de conciliation, et avait prévenu l'administrateur que cela ne correspondait pas à une occupation normale, et qu'il serait expulsé.
A. était énervé comme pas possible, il a passé son temps à insulter le juge, et son administrateur. Pas parce qu'il allait être expulsé. Cela il s'en fiche. De toute façon, il s'installe à l'étranger lundi prochain (j'entends cela depusi au moins 3 mois...) Il râlait parce qu'il avait dû attendre que son administrateur arrive au Palais! J'étais prévenu d'un retard d'une heure et demi, mais comme il perd son GSM tout le temps, il s'était déplacé pour rien, et cela justifiait sa colère.
Moi, je n'ai rien dit. Je n'avais pas à dire quoi que ce soit, les éléments parlaient tout seuls!!
L'administrateur a essayé de gagner du temps, en demandant à ce que le jugement soit rendu dans le mois.
Le juge:" Dans le mois? Pourquoi voulez-vous que j'attende un mois. C'est tout de suite. Le jugement est rendu aujourd'hui!" Et de le dicter au greffier...
Je passe sur les invectives de A. à l'adresse du juge "incapable, sans diplome... et vous avez eu votre diplome des primaires? ..."
Je dois donc signifier le jugement, chez l'administrateur, attendre un mois, et renvoyer les huissiers pour le mettre dehors. En espérant que l'administrateur aura fait ce qu'il faut pour le faire soigner.
Voici ce qui me turlupine: l'administrateur a précisé qu'il déposerait sa requête demain. Et que cela poserait un problème juridique pour l'expulsion. Et là, je n'ai pas compris. Si quelqu'un pouvait m'expliquer ce que l'administrateur a voulu dire, cela m'intéresserait...
Une phrase que le juge avait sorti à l'administrateur pour le remettre à sa place: "La jurisprudence? Ce n'est jamais que l'avis des autres. Chaque affaire est différente, et c'est moi qui juge celle-ci! Et c'est valable pour la cour de cassation aussi!" J'ai adoré!
Mon désir initial était que l'administrateur de bien de A. fasse le nécessaire. Rien ne fut fait. Aucune conciliation ne fut possible. La loi belge ne me donne donc aucune possibilité de venir en aide à A. Je vais donc en faire un SDF, et cela me rend malade.
Je suis obligé de le faire. Sinon, mes autres locataires vont se barrer. Sinon, comme il empêche tout le monde de dormir, il finira par y avoir un drame. J'avoue même être surpris qu'il ne se soit pas fait assassiné! Même la police refuse de se déplacer. Ils répondent "encore? mais jetez lui un seau d'eau!"
Si quelqu'un a une solution juridique, je suis preneur.
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C'est sans doute votre locataire fou de Nutella, dont vous vous êtes déjà inquiété auparavant ?
La liberté est en effet devenu un concept tout à fait étrange. Alors qu'il s'agissait, dans l'esprit des philosphes des lumières, d'un moyen puissant de rencontrer autrui de manière critique, avec libre arbitre, permettant par là de s'unir par des lois partagées, la liberté est de plus en plus vécue comme un repli de l'être sur soi même. La liberté d'aujourd'hui c'est moi, qui doit me réaliser à partir de moi-même, comme je le veux, parce que je le vaut bien. Quelle triste pauvreté de l'âme ....
J'ai personnellement connu un cas très émouvant, tout à fait similaire au vôtre. J'ai écumé services sociaux jusqu'à un président de CPAS, justices de paix, médecins, et rien à faire ... L'horrible, l'insoutenable sentiment d'impuissance. Et puis cette dernière crise et puis ...
L'administration de biens ne concerne pas la personne, mais uniquement ses biens. Voyez les art. 488bis et suivants du Code civil : "Le majeur qui, en raison de son état de santé, est totalement ou partiellement hors d'état de gérer ses biens, fût-ce temporairement, peut, en vue de la protection de ceux-ci, être pourvu d'un administrateur provisoire, lorsqu'il n'est pas déjà pourvu d'un représentant légal."
Contrairement à d'autres mécanismes, comme celui de la minorité prolongée par exemple, la personne administrée dans ses biens reste totalement libre de sa personne, de ses allées et venues, de ses choix, de ses thérapeutes, s'il y en a, etc.
Si cette personne n'est pas sérieusement soutenue par des (très) proches, elle est en quelque sorte livrée à elle-même.
Au fait, le juge de paix ne serait pas celui d'Eghezée par hasard ?
Pour ce qui concerne la requête, je ne vois pas trop non plus.
Bien à vous,
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Au fait, le juge de paix ne serait pas celui d'Eghezée par hasard ?
Ce n'est pas celui d'Eghezée. Pourquoi? C'est un bon aussi?
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Ce n'est pas celui d'Eghezée. Pourquoi? C'est un bon aussi?
Ses réflexions sur l'avis des autres et la Cour de cassation m'y ont fait penser
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J'ai demandé à ma chère et tendre qui bosse dans le social (elle aussi devrais-je dire ).
Si vous ne voulez pas l'expulser pûrement et simplement et lui assurer un suivi, il faut vous rapprocher du service social de la commune ou du CPAS et demander une mise sous tutelle, voire saisir le procureur du roi. Par la suite, le tuteur pourra chercher lui-même un autre logement, voir placer le nutellaphage en institut gastronomique. Evidemment, ca risque de prendre un temps certain, voire un certain temps.
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Je ne connais pas la signification des termes divers et bizarres tels que "mise sous tutelle", "admininistration de bien", "admionistration provisoire"... et ne sais donc pas la différence.
Il a un administrateur de bien. (= gérant du patrimoine et revenus, pas prescripteur de bonheur...) et je ne connais pas l'étendue de son pouvoir, ni ce que la loi permet.
J'ai pris contact avec la justice de paix, la police, le procureur du roi, les infirmières sociales, son pharmacien, son administrateur de bien, Proximus (si!),... mais pas avec le CPAS.
Bon, cela fera une tentative de plus. Merci.
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L'administrateur de biens n'a pas beaucoup de pouvoir contrairement au tuteur légal. En fait, il deviendrait en quelque sorte mineur.
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J'ai donc pris contact avec le CPAS. Visiblement, à la base, on préférait "suivre la procédure". Soit attendre l'expulsion. Ils préfèrent laisser faire l'urgence sociale quand il sera expulsé.
Bref, il n'existe rien qui puisse prendre les gens en charge avant qu'il ne soit trop tard. Je suis pour la responsabilité personnelle en général. Chacun est responsable de ses actes.... sauf quand on est incapable de se rendre compte.
J'ai cependant insisté. On m'a passé 5 personnes différentes pour me laisser raconter 5x la même histoire. Et puis: on vous rappellera...
La suite au prochain numéro...
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Voici le prochain numéro:
Visiblement, il y avait eu contact entre le juge de paix et l'administrateur provisoire.
Il avait été convenu que l'administrateur provisoire dépose une requête, ce qui a été fait.
Le juge va donc se rendre sur place (très vite!) pour respecter la procédure, et cela lui permettra de le faire interner en institution psychiatrique.
J'ai été prévenu de la visite du juge.
Par ailleurs, en faisant toutes mes chapelles, j'ai appris quelque chose: tout citoyen a le droit de déposer une requête devant le juge de paix s'il estime que quelqu'un débloque à plein tube. Si j'avais fait cela il y a 4 mois, on aurait peut-être déjà la solution...
Une fois cette requête déposée, le juge a 10 jours pour se rendre sur place et voir de ses yeux vu. J'avais été chez le juge de paix, et c'était la bonne chose à faire. J'aurais dû insister et déposer ma requête. Ils m'ont envoyé sur les roses (enfin, chez le procureur) mais j'avais le droit de déposer ma requête.
Si cela recommence, promis que j'agirai autrement...
Pour la petite histoire, le tribunal compétent est celui où habite la personne, pas celui dont il dépend pour son administration de bien.
La suite la semaine prochaine.
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Suite de l'épisode....
Le juge est donc passé sur place, avec un avocat (un autre) commis d'office par le batonnier, avec un psychiatre, avec l'administrateur de bien, et avec son greffiers. Et moi pour ouvrir les portes.
L'avocat commis d'office était également administrateur de bien, et m'a dit qu'il aurait fait la même chose ou presque: rien lui-même, pour éviter d'être mal mis juridiquement pour son client.
Il aurait ... juste donné le bon conseil: introduire la requête moi-même, comme tout citoyen peut le faire. Bref, confirmation que mon idée de déposer la requête moi-même était la bonne (pour la prochaine fois...)
Je retire donc mon commentaire sur l'administrateur de bien.
Il s'est fait que l'admnistré était de nouveau à la masse. Il a vendu tout son mobilier ce week-end: tables, chaises, machine à laver, séchoir, frigo,... tout ! Pour 30€ qu'il n'a pas touché, juste bu.... Je vous laisse imaginer son appartement.
Toujours est-il qu'il va sans doute être interné, suite à l'examen du psy, et l'avis rendu au juge sur le champ, et noté par le greffier illico. J'imagine jugement dans les 24h... et le gaillard sera colloqué avant mercredi. Enfin, je croise les doigts.
Je viendrai vous raconter la suite.
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suite et fin...
Aujourd'hui, vers 14H30, la police m'a contacté. Je suis bien connu de leurs services, comme on dit.
Ils cherchaient A. Ils allaient lancer la patrouille pour l'embarquer "en institution" (il parait qu'on ne dit plus "à l'asile") Il n'était pas chez lui, mais ils l'ont cherché... et l'ont trouvé.
Embarqué, terminé, c'est réglé. Il sera enfin soigné. Il pourra enfin être nourri correctement, et le voisin pourra enfin dormir.
Il n'y a "plus qu'à" vider l'appartement, le désinfecter, le nettoyer... et le relouer.
L'incident est clos. Et franchement, c'est pas dommage. La prochaine fois, je sais comment faire, et comment ne pas me laisser faire...
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Bravo.
Voila une belle anecdote à raconter à vos petits enfants au coin du feu.
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Heureux d'apprendre que cela se soit finalement passé pour le mieux.
Cordialement,
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