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Ce que la réforme du droit des biens change pour vous

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Ce que la réforme du droit des biens change pour vous

Une utile synthèse dans L'Echo
Usufruit, nue-propriété, relations de voisinage… Autant de points clarifiés par la réforme du droit des biens, qui entre en vigueur le 1ᵉʳ septembre. Voici les implications pour vous.

C’était un chantier très complexe mené par l’ancien ministre de la Justice, Koen Geens. Réformer le droit des biens, qui date de… Napoléon. Autant dire une éternité. "Les règles en matière de mitoyenneté ou conflit de voisinage notamment n’ont plus rien avoir aujourd’hui avec ce qu’on connaissait au début du XIXᵉ siècle", souligne le notaire Renaud Grégoire, "le ministre a donc voulu remettre à jour le Code civil, cela a déjà été fait pour les successions, la famille, le droit des obligations et désormais, c’est au tour du droit des biens", détaille-t-il.

1. Usufruit
La répercussion la plus concrète pour les particuliers dans cette réforme du droit des biens est sans aucun doute celle sur l’usufruit, essentiellement dans le cadre d’une succession. Les divorces, familles recomposées étaient des questions qui ne se posaient pas à l’époque napoléonienne. Comme l’espérance de vie a fortement augmenté, les décès sont également beaucoup plus tardifs aujourd’hui qu’au XIXᵉ siècle. "On se retrouve parfois dans des situations compliquées avec des beaux-parents usufruitiers et beaux-enfants nus-propriétaires", illustre le notaire, qui rappelle que l’usufruitier est l’occupant du bien, alors que le nu-propriétaire est le propriétaire.

La question, aujourd’hui, est souvent de savoir qui paie quoi et dans quelle proportion, surtout en cas de gros travaux? "Cela n’était pas réglé dans le code civil. Désormais, c’est clair: le nu-propriétaire est concerné par les gros travaux, comme le remplacement des châssis par exemple, tandis que l’usufruitier est concerné par les réparations d’entretien telle que la peinture des châssis", illustre Renaud Grégoire. "Mais la loi précise également et clairement que l’usufruitier doit aussi intervenir de façon proportionnelle à la valeur de son droit par rapport à la pleine propriété dans les frais de grosses réparations", poursuit-il.

Comment définit-on cette proportionnalité et que sont les grosses réparations? Ces dernières concernent les réparations structurelles ou celles dont le coût excède les fruits du bien. La proportionnalité, elle, est calculée en fonction de la durée de jouissance de l’usufruitier par rapport à son espérance de vie. La table de conversion de l’usufruit, publiée au Moniteur belge, et qui détermine la proportionnalité, "est régulièrement mise à jour en fonction de l’espérance de vie. D’ailleurs, les valeurs ne sont pas les mêmes pour les femmes et les hommes, qui n’ont pas la même espérance de vie".

Par exemple, si votre belle-mère de 65 ans est usufruitière du logement familial dont vous êtes le nu-propriétaire suite au décès de votre père, la valeur de son usufruit est de 20,39%  (proportionnellement à son âge, selon la dernière table de conversion publiée en juillet 2020). Elle devra donc intervenir proportionnellement dans les frais de grosses réparations. Si elle avait eu 75 ans, son taux de conversion d’usufruit s’élèverait à 13,01%. Plus l'usufruitier est jeune, plus la valeur de l'usufruit est élevée.

"Ce qui est aussi intéressant, c’est que la réforme répond désormais la question de l’assurance. La loi est très claire: l’usufruitier doit prendre une assurance pour couvrir l’entièreté de l’immeuble, le nu-propriétaire peut en demander la preuve à tout moment. Ce dernier a également désormais un droit de visite, une fois par an, afin de vérifier l’entretien de son bien et de déterminer si l’usufruitier le maintient en bon état", explique encore le notaire.

2. Relations de voisinage
Le nouveau droit des biens clarifie également certains points relatifs aux relations de voisinage comme les servitudes, la mitoyenneté, les troubles de voisinage, etc. Voici les principaux changements.

La mitoyenneté
La mitoyenneté est, pour rappel, un droit de copropriété d'une clôture séparative, qu'il s'agisse d'un mur, d'une haie, d'un fossé, d'une palissade, d'un grillage ou de tout autre élément matériel. En général, les clôtures réalisées en limite séparative ou à cheval sur la ligne séparative sont présumées comme étant mitoyennes, sauf prescription acquisitive ou titre contraire. Désormais, cette présomption de mitoyenneté peut aussi être contredite par une marque de non-mitoyenneté. Les marques de non-mitoyenneté sont: un mur dont le sommet est incliné du côté duquel il existe des éléments architecturaux attestant son caractère privatif (des tuiles par exemple), un fossé dont le rejet de terre est du côté du propriétaire présumé, etc.

"La réforme simplifie et clarifie également les règles dans lesquelles il est possible d’acquérir ou de céder la mitoyenneté d’une clôture", indique Renaud Grégoire. Tout propriétaire peut désormais rendre une clôture mitoyenne, en tout ou partie, en payant au propriétaire de la clôture la moitié de sa valeur ou de la valeur de la partie de clôture qu'il souhaite rendre mitoyenne et la moitié de la valeur du sol d'assise correspondant.

"Si vous avez un mur mitoyen, vous pouvez utiliser votre côté du mur en demandant l’accord à votre voisin. Mais, désormais, on peut aller en justice si le refus du voisin est sans raison", explique encore le notaire. En effet, selon le nouveau droit des biens, "dans les relations entre copropriétaires, les autres actes d'administration et les actes de disposition de la clôture exigent le consentement des deux, sauf si le juge estime qu'un refus constituerait un abus de droit. Toutefois, relativement aux actes d'usage et de jouissance, les copropriétaires peuvent agir entre eux comme s'ils étaient seuls propriétaires de la face de la clôture qui regarde leur fonds, s'ils agissent en respectant la destination de la clôture et sans porter atteinte aux droits de l'autre."

Les servitudes
"La réforme met de l’ordre du côté des servitudes, elle les rationalise. Les servitudes continues et discontinues ont été supprimées, seules les servitudes apparentes ou non apparentes persistent", indique Renaud Grégoire.

"Les servitudes apparentes sont celles qui s'annoncent au titulaire, prudent et raisonnable, d'un droit réel sur le fonds servant, soit par des ouvrages permanents et visibles, soit par une activité régulière et révélée par des traces sur le fonds servant. Les autres servitudes sont non apparentes", précise le code.

La réforme confirme désormais que les servitudes peuvent être constituées entre deux parcelles appartenant à des propriétaires différents mais aussi entre deux immeubles appartenant au même propriétaire, si l’un des deux est grevé d’un droit réel d’usage et entre deux immeubles dont la même personne est propriétaire pour l’un et copropriétaire pour l’autre.

Les troubles de voisinage
Un nouvel article dans le code permet anticipativement d’aller chez le juge si certains soucis de voisinage risquent de devenir problématiques. "Si un bien immeuble occasionne des risques graves et manifestes en matière de sécurité, de santé ou de pollution à l'égard d'un bien immeuble voisin, rompant ainsi l'équilibre entre les biens immeubles, le propriétaire ou l'occupant de ce bien immeuble voisin peut demander en justice que des mesures préventives soient prises afin d'empêcher que le risque se réalise", dit le code.

Concrètement, s’il y a un risque que des rapports de voisinage aient des conséquences qui peuvent poser problème, il sera désormais possible d’aller anticipativement en justice. "Il n’y a donc pas besoin d’attendre qu’un dommage soit causé. C’est une mesure préventive dans le but de prévenir des conflits qui prennent parfois des tournures dramatiques. C’est très innovant", reconnaît le notaire.

Autre élément: si le rosier de votre voisin empiète sur votre jardin, vous pourrez désormais couper les branches qui s’invitent chez vous. Il faudra d’abord effectuer la demande au voisin concerné, s’il refuse de s’en charger dans les 60 jours, vous pourrez alors les élaguer vous-même. "Si un propriétaire de plantations dont les branches ou les racines dépassent la limite séparative des propriétés néglige de couper celles-ci dans les soixante jours d'une mise en demeure par envoi recommandé du voisin, ce dernier peut, de son propre chef et aux frais du propriétaire des plantations, couper ces branches ou racines et se les approprier", dit le code.

3. La prescription acquisitive
La prescription acquisitive est un mode d'acquisition de la propriété d'un bien (mobilier ou immobilier) ou d'un droit réel d'usage par une possession prolongée pendant un certain temps. Le délai de la prescription acquisitive, qui était de 30 ans, passe désormais à 10 ans. Par exemple, si vous avez occupé une terre qui n’était pas la vôtre pendant au moins 10 ans, elle le devient après 10 ans pour autant que vous occupiez le bien de bonne foi. Si le possesseur est de mauvaise foi, le délai est alors porté à 30 ans.

4. Droit d’emphytéose
La durée minimale du droit d’emphytéose passe de 27 à 15 ans dans le nouveau code, et son caractère nécessairement onéreux disparaît. Désormais, pour les réparations, petites ou grosses, c’est l’emphytéote qui doit les réaliser. Si ce dernier a construit des immeubles sans y être obligé, il ne doit effectuer que les réparations nécessaires à l’exercice des autres droits réels d’usage sur l’immeuble.

(fin de citation)

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